De retour sur Toi et moi, it’s complicated

La semaine dernière, j’ai soumis mon court roman Toi et moi, it’s complicated à un éditeur. Le directeur littéraire m’a contacté le lendemain. Il dit qu’il a aimé, mais qu’il aimerait une histoire plus longue. Beaucoup plus longue.

En suivant ses recommandations, je dois maintenant tripler la longueur du livre.

Delà mon silence momentané sur ce blogue.

Ces temps-ci, j’écris 2000 mots par jour. Du jamais vu. Et l’incroyable, dans tout ça? J’ai déjà presque fini le travail. Ne resteront que les retouches et les corrections.

Le directeur littéraire, lui, peut encore refuser s’il le désire.

Métier ingrat.

Créer et détruire (3) – (Dé)composition

Ah, écrire.

On y pense souvent de façon positive : on construit une histoire, on fait vivre des personnages. Chaque séance de travail ajoute un peu plus à l’oeuvre en gestation, qui croît lentement et sûrement, jusqu’à maturation complète. Ajoutez la musique de harpe et les petits cœurs volants (sans oublier les bruits de bisous mouillés), et voilà, vous avez une représentation parfaite de l’écriture, n’est-ce pas?

Non?

Non.

L’écriture s’articule aussi (et j’avancerais même : principalement) par la négative. Par la réécriture (le côté obscur de la créativité), qui, souvent, permet à un texte d’accéder à ce qu’il est vraiment. Par la suppression intelligente (nécessaire) de passages, de personnages qui ankylosaient le récit, l’empêchaient de s’envoler.

Oui, il est toujours agréable de laisser courir ses doigts sur le clavier (ou sa plume sur le papier, pour les archaïques), de voir sa création prendre de l’ampleur, en terme de mots, de pages… Mais parfois, ce n’est pas tout à fait ça, ça ne fonctionne pas: non, à bien se relire, ce n’est pas ce qu’on voulait dire. Il faut recommencer. Effacer, quelques mots, quelques phrases. Un ou deux paragraphes, un chapitre entier. Dans un claquement de langue : clac, allez, ouste, même si c’est difficile (voir cette image amusante qui illustre bien l’idée, tirée d’un billet sur le blogue de Michèle Laframboise. En fait, allez donc lire le billet au complet).

Un roman, ou une nouvelle, ou un poème (et ainsi de suite) ne peut pas souffrir du moindre passage superflu. Si cette question est assez largement acceptée, il n’en est pas de même pour la définition de superflu: pour certain, c’est les descriptions qui sont à proscrire, car ils préfèrent les dialogues. D’autres, inversement, favoriseront les descriptions et réduiront autant que possible les dialogues rapportés directement, sauf si c’est pour en faire une trame narrative (c’est mon cas). Certains chercheront à produire une atmosphère, au détriment, parfois, des autres aspects du texte, comme les personnages, l’intrigue, l’idée, le style (quoiqu’une bonne atmosphère s’articule habituellement à travers une écriture impeccable). Pour être en mesure de savoir quoi garder et quoi jeter dans un texte (ce qui est bon et ce qui ne l’est pas), il faut une certaine sensibilité littéraire, qui se développe en écrivant, bien sûr, mais aussi en lisant et, surtout, en se relisant : il faut atteindre une connaissance assez profonde de soi et de son écriture. C’est très difficile, parce qu’on est souvent mal placé pour juger ce qui a si longtemps été en gestation dans notre cerveau (dit comme ça, ça sonne un peu entité parasitaire, mais enfin). Il faut un regard objectif, idéalement extérieur. C’est pourquoi même les auteurs aguerris s’entourent d’une petite équipe de bons lecteurs, qui pourront leur pointer les failles narratives ou langagières de leurs oeuvres. Et c’est aussi pourquoi les directeurs littéraires existent. Mais ça, c’est le sujet de mon prochain billet!

Créer et détruire (2) – Pertinentes, les études littéraires?

Des études en littérature sont-elles nécessaires pour écrire?

La réponse courte est, évidemment, non. La réponse longue ressemble fortement à ça aussi, mais avec davantage de mots.

Mais est-ce dire que les études littéraires sont inutiles pour un écrivain?

Alors là, c’est plus complexe. Plusieurs (probablement la plupart) des auteurs n’ont pas de formation d’écrivain autre que leur expérience personnelle. De toute façon, il n’existe pas de diplôme attestant que telle personne est un auteur reconnu, comme c’est le cas, par exemple, pour les médecins, les ingénieurs, les chimistes et toutes les autres personnes utiles à la société (ce que l’écrivain, en tant qu’individu, n’est pas, même s’il y contribue grandement). Il existe bien des certificats en création littéraire, des diplômes d’études collégiales, des baccalauréats, des maîtrises en création (c’est d’ailleurs ce que je fais en ce moment), mais ce n’est en aucun cas des usines à écrivains. Les écrivains qui graduent de ces programmes étaient déjà écrivains au moment de l’inscription.

(Je n’ai pas fait de certificat en création, mais j’ai suivi plusieurs ateliers de création au cours de mon baccalauréat. C’est à partir de cette expérience que je parlerai donc.)

Dans des cours de création, il n’est pas vraiment question de comment écrire: au mieux, on verra comment ne pas écrire. On peut étudier les différentes formes que peut prendre un récit, mais pas en souligner les meilleurs (il n’y en a pas); on peut répertorier les diverses formes de structures narratives, mais pas les classer des plus efficaces au plus hermétiques: c’est une question de style, de langue, et c’est propre à chacun, dans l’absolu. Dans les contextes d’atelier, où les étudiants soumettent des textes au professeur et à la classe, il peut certes ressortir des conseils très pertinents pour qu’ils puissent améliorer leur plume, réaliser ce qui cloche dans leurs textes, apprendre à retravailler leurs écrits, mais qui peut aider un écrivain dans son développement sans pour autant remplacer les heures, les semaines et les mois que chaque auteur doit passer seul à polir encore et encore ses créations…

Dans le contexte de la maîtrise en création (plus précisément, en études littéraires, profil création), à l’UQAM tout de moins, c’est un peu différent. À temps plein, le programme dure deux ans: une année de scolarité (des cours) et une de rédaction. Les cours, à raison de deux par session, servent à la fois à préparer le sujet du mémoire qui sera écrit dans la deuxième partie de la maîtrise et à permettre d’élaborer des réflexions générales et souvent assez abstraites sur l’écriture. C’est beaucoup de lecture de textes théoriques, de discussion, d’écriture d’essais. Aussi étrange que cela puisse paraître, je n’ai jamais aussi peu écrit que depuis que je suis à la maîtrise en création… Je vais me rattraper au cours de l’année prochaine, par contre, où je devrai écrire mon mémoire à temps plein. Typiquement, d’ailleurs, le mémoire de création est séparé en deux parties: d’abord un volet création environnant les cent pages (et qui peut prendre bien des formes: romans, recueil de nouvelles ou de poèmes, long poème, fragments, etc) et un appareil réflexif (un essai, donc) d’une quarantaine de pages qui peut porter sur à peu près n’importe quoi, tant que c’est en rapport avec l’écriture. Même si la rédaction du mémoire se fait avec l’aide d’un directeur (qui joue un rôle assez semblable à celui du directeur littéraire, dans le milieu de l’édition) et que le travail qui est accompli dans le cadre de la maîtrise peut effectivement être très bénéfique sur la qualité des oeuvres futures d’un écrivain, encore là, il ne s’agit pas vraiment d’apprendre à écrire, mais plutôt de faire preuve, en plus de la production d’une oeuvre littéraire, d’une capacité de réflexion sur l’acte créatif.

En somme, donc, l’université et le cégep ne sont pas des endroits pour apprendre, littérairement parlant, à écrire. Des cours de grammaire, par contre, sont toujours très pertinents, même pour ceux et celles qui n’ont pas (ou ne croient pas avoir) de difficulté avec la langue.

Par contre, tous les bons écrivains sont aussi de bons lecteurs (je me risque rarement aux généralisations, mais celle-ci est indéniable). Et la lecture, au contraire de l’écriture, s’apprend en contexte institutionnel. C’est un peu le but des études littéraires, en fait: amener l’étudiant à formuler un discours cohérent et articulé sur un texte ou un corpus donné. Et pour ça, il faut lire, beaucoup, des romans, des essais. Et ces lectures, même faites dans un contexte scolaire, viennent alimenter l’écriture des auteurs, que ce soit sur le plan de l’écriture (la révélation de telle tournure de phrase, la sensibilité à un rythme, à une sonorité) ou des idées. C’est, somme toute, bénéfique pour ceux qui sont capables d’en tirer de la matière d’écriture.

Bien sûr, il peut y avoir des dérapages, comme quand un auteur, impressionné par une théorie littéraire, décide de construire un texte partir de cette théorie. Le résultat, souvent, est imbuvable et de très peu d’intérêt. Cependant, si on peut éviter ce genre d’écueil un peu pédant, ça va.

Dans certain cas, cependant, les études littéraires ont l’effet inverse: on gèle, l’écriture se fait rare, se tarit, que ce soit par surexposition ou par complexe d’infériorité. C’est souvent une question de confiance. Je connais des personnes très talentueuses qui ont plus ou moins mis l’écriture de côté (consciemment ou non) pour la durée de leurs études en littérature. J’espère vivement qu’elles sauront renouer avec leur voix intérieure.

Pour en revenir à la question du début, je ne crois pas que les études littéraire soient complètement inutiles aux écrivains. Elles sont, disons, optionnelles, ne garantissent en rien une qualité quelconque des oeuvres, mais elles permettent de se donner le temps d’acquérir les bases d’une cultures littéraire et générale, ce qui n’est jamais un atout négligeable. Des études en littératures, c’est l’occasion de découvrir des auteurs qu’on ne connaîtrait probablement pas autrement, d’apprendre sur des pratiques d’écriture qui nous seraient sûrement restées inconnues si on avait décidé d’apprendre en autodidacte.

Mais en même temps, d’un point de vue pratique, économique, les études littéraires ne sont viables que pour ceux qui projettent de devenir professeur, que ce soit au cégep où l’université (ce n’est pas mon cas, mais j’ai l’esprit de contradiction). Il y a quelques autres débouchés, oui, mais qui sont fort peu nombreux, malheureusement. Rien n’empêche, bien entendu, de compléter, par exemple, un baccalauréat, un certificat, un DEC ou une maîtrise en littérature avant de changer de domaine d’étude, dans le but avoué de se trouver un emploi. C’est une stratégie qui demande temps, motivation et argent, cependant, on comprendra que ce n’est pas tout le monde qui peut ou qui veut s’y essayer.

Pour ma part, je suis à l’aise avec les choix d’études que j’ai faits. La plupart de mes auteurs préférés ont été découverts en contexte scolaire (Witold Gombrowicz, Louis-Philippe Hébert, José Saramago, Hubert Aquin). Autre fait intéressant, les études littéraires m’ont permis de rencontrer plusieurs personnes avec qui je me suis découvert des affinités et avec qui j’ai développé de bonnes relations. L’équipe de Brins d’éternité, notamment, est entièrement constituée d’étudiants (surtout d’étudiantes, en fait) en littérature. Même si le milieu universitaire peu souvent sembler hautain et pédant (et il l’est, parfois), il ne faut pas oublier qu’un contact humain, authentique et enrichissant, peut aussi y naître.

Le Salon du livre jeunesse de Longueuil

Juste un petit mot pour inviter les copains et copines de Montréal à se rendre au Salon du livre jeunesse de Longueuil. J’y serai du 11 au 13 février, toute la journée, et Guillaume Houle prendra la relève pour le samedi et le dimanche.

En regardant le programme, je réalise que la compétition ne sera pas bien forte; le mercredi, nous serons seulement 6 auteurs sur place! Je me demande quelle influence cela aura sur les ventes. Moins de compétitions égalereait plus de ventes? Ou peut-être que la faiblesse de la programmation va décourager les gens à venir…

J’en parlerai dans mon prochain rapport.